Le droit au logement des squatters prévaut-il sur le droit de propriété ? L’humanitaire est-il plus fort ?
La Cour de cassation met un terme à ce débat par une décision de principe !
Des squatters roms occupaient depuis près de trois ans un terrain au Mas Rouge à Montpellier avec des caravanes. Les propriétaires ont saisi la justice en expliquant qu’ils ne pouvaient plus mettre leur terrain en location, qu’ils avaient reçu une mise en demeure des services sociaux de la ville du fait de risques de pollution et de menaces sanitaires (épidémie de shigellose) causés par les dépôts d’ordures des squatters et que des plaintes ont été déposées contre eux, propriétaires des lieux jugés responsables de troubles de voisinage.
Ces propriétaires ont demandé et obtenu leur expulsion devant le tribunal de grande instance de Montpellier puis devant la cour d’appel, les juges constatant « un trouble manifestement illicite caractérisé par l’occupation sans droit ni titre ».
L’avocat des squatters a fait un recours devant la Cour de cassation en soutenant que « la perte d’un logement est une atteinte des plus graves » pour ces familles et leurs enfants -une centaine de personnes - et qu’en conséquence, les magistrats devraient « mettre le droit de propriété en balance avec leur droit au respect de leur domicile et de leur vie privée ». Pour ces squatters, l’expulsion ordonnée était « disproportionnée par rapport au trouble de jouissance allégué par les propriétaires ».
Jusqu’à présent les magistrats saisis procédaient à cette « mise en balance » selon les circonstances propres à chaque squat.
La Cour de cassation, pour la première fois, pose un principe pour régler ce genre de situation : « l’expulsion étant la seule mesure de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien occupé illicitement, l’ingérence qui en résulte dans le droit au respect du domicile de l’occupant, protégé par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l’atteinte portée au droit de propriété ».
La Cour suprême affirme donc clairement la suprématie totale du droit de propriété sur le droit au logement invoqué par les squatters et leurs associations de défense.
Les juges ajoutent, pour écarter toute ambiguité, donc écarter toute appréciation des circonstances, que « le droit de propriété ayant un caractère absolu, toute occupation sans droit ni titre du bien d’autrui constitue un trouble manifestement illicite permettant aux propriétaires d’obtenir en référé l’expulsion des occupants ». Les arguments humanitaires invoqués par les associations de défense de ces familles ne peuvent donc pas prévaloir sur le droit de propriété, affirment la Cour suprême.
(Cour de cassation, 3e chambre civile, 4 juillet 2019
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